Antony déploie une « boîte à outils » pour mesurer la qualité de l’air
La commune francilienne de 61 000 habitants a fait de l’amélioration de la qualité de l’air une de ses priorités. Grâce à des capteurs et à une application mobile, elle permet aux habitants de suivre en temps réel le niveau de polluants dans l’air.
Entretien avec Alina Akhmerova, chargée de mission smart city à la Ville d’Antony
Ce projet est présenté par :
- Alina Akhmerova, chargée de mission smart city à la Ville d’Antony
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
Antony a fait de l’amélioration de la qualité de l’air une de ses priorités. Grâce à différents types de capteurs collectant des données consultables via une application mobile, cette commune francilienne propose aux habitants de suivre en temps réel le niveau de polluants dans l’air.
Comment la surveillance de la qualité de l’air s’est-elle imposée à l’agenda de votre collectivité ?
Dès 2015, notre majorité municipale a impulsé une politique d’amélioration de la qualité de l’air pour veiller à la qualité de vie de nos concitoyens. Notre commune de 61 000 habitants, située en Ile-de-France, connaît un trafic dense. Elle est traversée par une route nationale et par une départementale, ainsi que par deux lignes de RER. Notre objectif était de sensibiliser les citoyens et de les informer de l’évolution de la quantité de polluants dans l’air, notamment pour informer les habitants les plus fragiles, afin de limiter les risques pour la santé et l’environnement. Pour mesurer les particules polluantes et surveiller leur évolution, nous avons donc entrepris le déploiement d’un dispositif complet de surveillance et de suivi, basé sur plusieurs outils innovants.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
Notre élu, Ioannis Vouldoukis, délégué à l’hygiène, à la santé et aux sciences, avait envie d’avancer sur ce sujet. C’est ainsi qu’il y a neuf ans, nous avons commencé par installer des « bio-stations » aux abords des écoles, des établissements publics ou devant l’hôtel de ville. Nous avons installé des plantes normalisées par l’association française de normalisation (Afnor) permettant de mesurer la qualité de l’air via l’apparition de tâches. Ce sont aussi des plantes capables d’absorber les polluants grâce à la phytoremédiation.
Au total, la commune a installé soixante bio-stations sur son territoire. Les endroits d’implantation ont été choisis stratégiquement, au niveau des places ou des axes les plus fréquentés. Avec ce dispositif, l’objectif était avant tout de sensibiliser la population afin de faire changer les comportements et de faire prendre conscience de l’importance de limiter les polluants. Nous avons fait beaucoup de pédagogie autour des bio-stations, pour inciter les habitants à préférer la marche à la voiture par exemple. Les plantes sont surveillées par les agents chargés de l’entretien des espaces verts, qui assurent un suivi régulier grâce à des photos et des prélèvements sur les feuilles et dans la terre.
Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?
Aucune étude de faisabilité ou d’impact n’a été réalisée, mais en 2019 nous avons participé à un challenge, nommé POC&Go, qui nous a permis de tester les capteurs de la qualité de l’air et de mieux définir nos besoins. Ce challenge, réservé aux start-up et PME, invitait les candidats à prototyper un outil d’aide à la décision destiné aux élus et agents de la mairie leur permettant de mieux déterminer les actions à mener pour améliorer la qualité de l’air et également pour mieux informer les citoyens. Grâce à ce challenge, la startup AtmoTrack, qui développe une technologie brevetée, intégrée à des micro-capteurs, a mis à disposition de la ville des capteurs et développé une application, nommée Caeli, pour connaître en temps réel la qualité de l’air environnant à l’échelle d’une rue ou d’un quartier. Cela permet de suivre la présence de polluants et leur évolution et d’être alertés en cas de pic de pollution. L’application fournit également des conseils et des bonnes pratiques à adopter en fonction du niveau de pollution.
Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ?
Il faut surtout s’entourer des bons interlocuteurs. Notre prestataire de capteurs d’air Atmotrack fait pour nous des rapports d’analyse, car nous n’avons pas la capacité d’analyser finement les données et de vulgariser ce sujet, qui est assez scientifique.
Nous travaillons également avec le laboratoire central de la préfecture de police, en organisant annuellement des campagnes de surveillance de la qualité de l’air. Des capteurs fixes sont ainsi installés au niveau de plusieurs endroits stratégiques et permettent de réaliser des relevés pendant un mois. Sur cette période, ils enregistrent les concentrations de dioxyde d’azote, de particules PM10, de métaux lourds, de composés organiques volatiles d’hydrocarbures aromatiques monocycliques (COV-HAM) et d’ozone. Nos derniers résultats étaient globalement inférieurs à ceux obtenus sur les sites de références d’Airparif (organisme français agréé par le ministère de l’Environnement pour la surveillance de la qualité de l’air en région Île-de-France).
Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment la collectivité a-t-elle assuré le bon dimensionnement du projet et l’adhésion des citoyens ?
Lors du budget participatif de 2018, des habitants d’Antony ont eux-mêmes fait part de leur volonté d’aller plus loin dans la démarche et d’installer des capteurs permanents. Pour répondre à leur volonté, quatre capteurs de la qualité de l’air ont été installés en 2020. Ils mesurent les particules fines, le dioxyde d’azote ou encore l’ammoniac lié à l’agriculture intensive. Et après une phase expérimentale concluante, nous avons décidé d’installer 12 capteurs supplémentaires sur les façades de différents bâtiments publics pour doter nos quartiers de capteurs d’air fixes.
Fin 2021, nous avons décidé de compléter notre palette d’outils par des capteurs de pollen, qui mesurent le risque pollinique. Nous nous sommes rapprochés de la société Lify Air, qui a mis au point une technologie brevetée, co-développée par le centre national de recherche scientifique (CNRS). Elle nous a mis à disposition trois boîtiers capables de mesurer les risques polliniques sur des secteurs définis. Grâce à l’application LivePollen, les citoyens peuvent avoir accès à toutes les données relevées par les capteurs pour prévenir les crises polliniques.
Comment la collectivité a-t-elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?
Nous n’avons pas sollicité d’aides pour ce projet. Les outils ont tous été autofinancés, nous n’avons pas eu besoin de financements extérieurs. Depuis 2015, environ 100 000 euros ont été engagés dans la surveillance de la qualité de l’air. Nous avons par ailleurs mené des collaborations ciblées pour mener à bien ces projets, notamment avec les sociétés AtmoTrack ou LifyAir.
Et nous souhaitons poursuivre nos efforts. Dans le cadre des travaux liés au Grand Paris Express, qui prévoit la création d’une ligne passant par Antony pour relier l’aéroport d’Orly à l’arrêt Versailles Chantiers, nous souhaitons être encore plus vigilants quant à la présence de polluants. Nous envisageons d’installer d’autres capteurs permettant de mesurer les particules très très fines, afin de connaître l’impact des travaux sur la qualité de l’air. Nous voulons également communiquer davantage avec la population et par d’autres biais, car nous savons que tout le monde n’est pas connecté. Nous envisageons d’organiser des ateliers de sensibilisation et de communiquer plus largement avant les pics de pollution. Nous voulons sensibiliser les gens au bon moment et inciter les citoyens à se déplacer à pied plutôt qu’en voiture pour les petits trajets par exemple.
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Le projet en détails
Dates clés
2015
A partir de 2015
2019
2021
Chiffres clés
70
16
Plus de 800
À retenir
La Ville d’Antony a, grâce à ce projet, obtenu le label bronze « territoire innovant » en 2024 pour son approche « multifacettes accompagnés d’outils approuvés scientifiquement » et a reçu le prix de La Gazette des Communes lors du Salon des Maires en 2023.
Cela permet d’alerter les populations les plus sensibles, de sensibiliser aux enjeux de la qualité de l'air, et de mieux la comprendre et la suivre.
Mise à part la sensibilisation de la population, la municipalité a peu de marge de manœuvre pour améliorer la qualité de l’air.