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Gestion des risques : Montpellier se dote d’un système d’alerte innovant pour anticiper les crues

Consciente de sa vulnérabilité face aux inondations et à la montée des crues, la Métropole de Montpellier investit dans des systèmes de surveillance des cours d’eau. Grâce à leurs capteurs détectant la hausse soudaine du niveau de l’eau et le franchissement de certains seuils, ces technologies envoient des alertes et permettent une exécution rapide des plans d’action communaux.

Entretien avec Nils Souteyrand, ingénieur Prévision et gestion de crise au sein du pôle « Déchets et cycles de l’eau » de Montpellier Méditerranée Métropole

Parole de collectivité
Nils Souteyrand - Crédits photo : Smart City Mag
Transition écologique et énergétique

Ce projet est présenté par :

  • Nils Souteyrand, ingénieur Prévision et gestion de crise au sein du pôle « Déchets et cycles de l’eau » de Montpellier Méditerranée Métropole

Parole de collectivité

Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets de gestion de l’eau sur votre territoire, aquagir part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action

9e métropole de France en 2023, l’agglomération de Montpellier regroupe 31 communes pour un total de 305 743 habitants. Dynamique et rayonnant, ce territoire attire chaque année de nouvelles populations. L’intensification des phénomènes météorologiques en lien avec le dérèglement climatique oblige la collectivité à anticiper la montée rapide des crues. Pour se prémunir de telles catastrophes, la Métropole de Montpellier a choisi de se doter de 40 capteurs électroniques qui assurent la surveillance en temps réel d’environ 200 kilomètres de cours d’eau. Pour en parler, nous avons rencontré Nils Souteyrand, ingénieur Prévision et gestion de crise au sein du pôle « Déchets et cycles de l’eau » de Montpellier Méditerranée Métropole.

Comment ce projet s’est-il imposé à l’agenda de la Métropole ?

C’est assez historique. Notre territoire est confronté à des épisodes méditerranéens caractérisés par d’intenses phénomènes orageux et de fortes pluies. Par conséquent, différentes crues majeures se sont produites sur le bassin versant du Lez et l’Étang de l’Or, notamment en 2003, 2005, 2011 et 2014.

Ces dernières années, en lien avec le dérèglement climatique, nous sommes soumis à des épisodes plus intenses. En outre, le territoire s’urbanise et s’artificialise énormément, avec une forte augmentation démographique annuelle, ce qui nous impose de surveiller ces cours d’eau particulièrement sensibles. Le but des systèmes de surveillance en temps réel est que nous soyons avertis au plus vite afin de prévenir l’ensemble des élus du territoire métropolitain.

Comment êtes-vous parvenu à développer cette solution ? Quelles ont été les sources d’inspiration pour réaliser ce projet ?

La mise en place de ce dispositif d’alerte s’inspire de mesures déjà initiées par les services de l’État, telles que Vigicrues Flash qui propose des systèmes d’alertes locales. Néanmoins, lorsque nous avons commencé à utiliser ce service, nous nous sommes aperçus qu’il ne répondait pas totalement aux besoins de la Métropole. C’est une des raisons pour lesquelles nous avons complété cet instrument en développant notre propre système de surveillance des cours d’eau.

Historiquement, l’installation des deux premiers capteurs s’est faite à l’occasion de la Coupe du monde de 1998 ! Montpellier était une ville qui accueillait des matchs de foot, notamment dans le stade de la Mosson, qui a été construit en pleine zone inondable. Puis, au fur et à mesure, nous avons continué à observer d’autres cours d’eau qui étaient sensibles comme le Lez, le fleuve emblématique de la métropole, ou encore la Mosson, un affluent.

Nous nous sommes aussi inspirés d’autres territoires, surtout Nîmes qui a développé un système de surveillance des cours d’eau : le ESPADA. Nous avons également consulté le syndicat mixte des Alpes-Maritimes regroupant la zone qui va de Cannes jusqu’à Menton, avec tout l’arrière-pays niçois particulièrement touché par les inondations.

2012 représente une date clé : elle marque le démarrage du projet d’Ecocité, qui a ensuite permis de développer le système « Ville en Alerte ». Cela nous a permis de collaborer avec des prestataires stratégiques comme Predict Services (une filiale de Météo France), la société Egis Eau, Ceneau et Synapses. Grâce à ces quatre acteurs, nous avons amélioré notre dispositif de surveillance des crues, notamment en augmentant le nombre de capteurs installés sur la métropole. Aujourd’hui, nous surveillons près de 200 kilomètres de cours d’eau, pour un parc total de 40 capteurs.

Est-ce qu’une étude de faisabilité et/ou d’impact a été réalisée sur ce projet ?

Nous n’avons pas fait d’études de faisabilité ou d’impact mais nous travaillons étroitement avec les municipalités. Ces dernières ont exprimé clairement leur besoin que les cours d’eau soient surveillés.

Dès qu’une crue surgit, le capteur mesure le franchissement de seuils et envoie une alerte SMS sur un certain nombre de numéros de téléphone, dont celui du maire, des équipes techniques, et le nôtre, les gestionnaires. C’est ce qui nous permet de connaitre en temps réel l’état des cours d’eau sur le territoire. Dès que nous recevons des alertes, cela déclenche des plans d’action. Nous identifions de manière prioritaire les voiries sensibles. Les procédures suivantes relèvent ensuite des compétences communales qui doivent envoyer, par exemple, une campagne d’alerte pour les habitations localisées dans le secteur inondable. Avec cet outil, nous améliorons la gestion des crises et nous pouvons élaborer des plans de plus en plus opérationnels.

Quels sont les conseils à donner à une autre collectivité souhaitant implanter un même système d’alerte ?

L’implantation de ce type de système d’alerte requiert des compétences en hydrologie et météorologie. Celles-ci permettent de faciliter la prise de décision concernant les outils, les stations, les capteurs utilisés pour mesurer les cours d’eau, les paramètres, etc.

Si les collectivités ne disposent pas de ces connaissances en interne, elles peuvent se faire accompagner par des partenaires extérieurs comme les services de l’État (notamment le service de prévision de crues) ou des bureaux spécialisés.

J’ajouterais qu’il est nécessaire de collaborer de manière étroite avec les communes du territoire. En ayant été confrontées pendant des années à des évènements météorologiques, elles disposent d’une analyse fine du terrain. Cette collaboration permet d’affiner la position, la qualité des seuils que l’on va maitriser sur les sondes. J’en suis convaincu : si nous ne travaillons pas en étroite collaboration avec les communes, alors le programme ne sera pas réussi.

Comment le projet a-t-il été conçu de sorte qu’il corresponde à la fois aux besoins du territoire et à des critères de faisabilité ?

Ce projet s’inscrit dans le long terme. Quand je suis arrivé il y a quatre ans, la Métropole avait 19 stations de surveillance. Aujourd’hui, nous en avons 40. Le nombre de capteurs a doublé car nous avons traversé des évènements qui ont marqué les territoires et révélé de nouveaux besoins.

Nous travaillons directement avec les communes qui doivent construire leurs plans d’action dans lesquels apparaissent leurs besoins. Ensuite, nous les chiffrons pour pouvoir partager les financements.

Comment la collectivité a-t-elle financé le projet et quelles sont les conditions pour bénéficier d’aides financières ?

Dans les grandes lignes, une quarantaine de stations représentent un investissement d’environ 480 000 euros. Sachant que parmi cette somme, nous avons pu bénéficier d’aides à travers le programme de l’Ecocité qui avait démarré en 2012. Mais aussi grâce au PAPI (Programme d’Action de Prévention des inondations) porté par les syndicats mixtes spécialisés.

Nous sommes aujourd’hui dans le programme d’action PAPI numéro 3 sur le bassin versant du Lez. Récemment, la Métropole a sollicité une enveloppe de 100 000 euros, parce que nous avons besoin d’installer de nouveaux capteurs.

Quels sont les différents acteurs qui ont accompagné la Métropole de Montpellier dans la préparation et la réalisation de ce projet ?

Premièrement, dès que l’on peut, la Métropole partage ses expériences avec d’autres collectivités équivalentes soumises aux mêmes évènements. Dans notre cas, elles se situent principalement sur le pourtour méditerranéen. Nous échangeons ainsi beaucoup avec le syndicat de La Tête, côté Pyrénées-Orientales et le SMIAGE côté Cannes-Nice-Menton.

Pour répondre à votre question, nous avons principalement travaillé dans le cadre de marchés publics avec les quatre prestataires qui ont conçu l’outil « Villes en Alerte », à savoir, Predict Services, Egis Eau, la société Ceneau et la société Synapse. Nous avons mis en place deux types de marchés. D’une part, un marché de fourniture et de pose des capteurs, de l’autre, un marché de maintenance qui prend le relai une fois qu’on a fourni et posé tous les équipements. En cas de dysfonctionnement, quand un capteur tombe en panne, nous déclenchons une maintenance curative qui va permettre à l’entreprise d’intervenir sur site pour changer tel ou tel équipement.

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Le projet en détails

Dates clés

1998

Coupe du Monde de Foot et installation des premiers capteurs sur le territoire de Montpellier

2012

Démarrage du projet Ecocité permettant d’avoir de nouveaux capteurs et de commencer à surveiller de nouveaux cours d’eau

2021

Modernisation et remise à neuf totale du parc avec de nouveaux composants et de nouveaux modes de transmission

Chiffres clés

40

Stations actuellement présentes sur le territoire, et 45 d’ici 2025

200

Kilomètres de cours d’eau surveillés

480 000€

Coût total du projet (avec le prix d'une station de surveillance entre 10 000 et 15 000€)

À retenir

Il y a une certaine fierté du territoire à se dire qu’aujourd’hui, sur les 300 kilomètres de cours d’eau qui traversent notre territoire, nous en surveillons 200. Notre réactivité par rapport aux évènements prévus s’est nettement améliorée. En effet, le fait de pouvoir assurer une surveillance en temps réel est un véritable point positif en période de gestion de crise.

Une aussi vraie collaboration s’est opérée depuis quelques années avec les maires et les DGCS. Le partage des instruments et la synergie entre les réseaux d’acteurs viennent fluidifier la gestion de crise. Nous sommes tous sur le même niveau d’information et c’est un vrai avantage.

Des difficultés d'ordre technique se posent quand on installe des instruments : dans les zones à relief, l’implantation d’une station de surveillance n’est pas évidente. Il est également nécessaire de bien identifier le besoin en amont pour ajuster au mieux la qualité du capteur. Autre défi technique : comment faire passer la donnée ? Notre capteur enregistre une hauteur d’eau et transmet cette donnée via un réseau 3G ou 4G. En revanche, le jour où se produit une panne, ces informations ne nous parviennent plus.

Les acteurs de la filière eau impliqués dans ce projet

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