Un enjeu important pour les collectivités territoriales à explorer lors de cette semaine action sur l’IA
Le Sommet pour l’Action sur l’Intelligence Artificielle se tient à Paris du 6 au 11 février 2025. Ce rassemblement international vise à réunir chercheurs, décideurs, entreprises, artistes et citoyens autour des enjeux de l’IA, axé sur l’intérêt général. Pour les collectivités locales, l’importance de l’IA croît, offrant des opportunités d’optimiser la gestion des ressources publiques et d’améliorer les services aux citoyens.
Du 6 au 9 février, les journées scientifiques, conférences et tables rondes qui seront suivies du forum international et du Sommet des Chefs d’État les 10 et 11 février au Grand Palais, exploreront les applications concrètes de l’IA dans des domaines essentiels pour les territoires. Les collectivités, qui pour certaines ont commencé à se pencher sur l’IA, échangeront sur la manière dont l’IA peut, entre autres et au-delà des simples générations de contenus, améliorer la gestion des infrastructures urbaines, optimiser la collecte des déchets ou prévoir les pics de trafic.
« On n’est pas là pour faire de l’hypertechnologie dans les territoires mais on est pour partir du terrain, de l’irritant pour le citoyen » indiquait Frédéric Chaillan, Directeur aménagement numérique à Grand Paris Sud Seine Essonne Sénart, lors de la 3ème Edition des Assises de l’IA dans les territoires fin 2023.
Plus d’une collectivité sur deux (51%) affirme avoir déjà mis en place ou testé un système d’intelligence artificielle au cours de l’année 2024 ou annonce vouloir le faire dans les douze prochains mois (source : Edition 2024 de la Note de conjoncture Data, IA et Cybersécurité). La progression de l’utilisation de l’IA par les collectivités est donc massive.
Ce sommet et ces conférences permettront aux acteurs locaux de s’informer sur les avancées en IA et comprendre comment ces technologies peuvent servir l’intérêt public, tout en abordant les questions éthiques et de gouvernance.
Selon l’enquête Ipsos parue dans la Note de conjoncture Data, IA et Cybersécurité, les Français sont globalement inquiets et méfiants face au développement de l’IA dans notre société, mais ils expriment des attentes et pensent que l’IA va de plus en plus contribuer à gérer des enjeux complexes. Ils sont ainsi 84 % à penser que l’IA jouera un rôle important, voire essentiel, dans la gestion des consommations énergétiques, 81 % dans la gestion de l’eau, 78 % dans les transports dans la ville, 73 % dans la lutte contre le réchauffement climatique et 72 % dans l’accueil et l’information du public.
Les grandes orientations du Sommet pour l’Action sur l’Intelligence Artificielle en France les 10 et 11 février
Les objectifs principaux du sommet s’articulent autour de deux axes :
- la formation d’une coalition internationale pour une IA durable, visant à exploiter le potentiel de cette technologie tout en préservant les intérêts sociétaux et environnementaux
- l’établissement d’une gouvernance internationale de l’IA, essentiel pour harmoniser les approches et les standards à l’échelle mondiale
Un point fort du sommet sera la création d’une fondation dédiée à une IA au service de l’intérêt général. Cette initiative vise à garantir que le développement et le déploiement de l’IA bénéficient nos sociétés, économies et environnement, dans le respect du bien commun, comme l’indique Anne Bouverot, organisatrice du Sommet pour l’Action sur l’intelligence artificielle, dans une interview récente. Cette fondation jouera un rôle central dans la promotion d’une IA éthique et responsable, alignée sur les valeurs démocratiques et les droits humains.
Le sommet réunira des chefs d’État, des dirigeants d’organisations internationales, des représentants d’entreprises, des universitaires, des chercheurs, des experts, des ONG, des artistes et d’autres membres de la société civile. Cette approche multisectorielle souligne l’importance d’une collaboration pour façonner l’avenir de l’IA.
L’Intelligence artificielle au service des collectivités territoriales
En amont de ce sommet, le gouvernement français a annoncé une initiative majeure pour intégrer l’intelligence artificielle (IA) dans le fonctionnement quotidien des collectivités territoriales. Cela vise à moderniser les services publics et améliorer l’efficacité administrative.
Déploiement d’un agent conversationnel pour les agents publics
Le ministre de l’Action publique, Laurent Marcangeli, a annoncé qu’un logiciel similaire à ChatGPT sera bientôt disponible pour les 5,7 millions d’agents publics en France. Cet outil permettra aux agents d’effectuer des tâches telles que des recherches, la préparation de courriers, la rédaction de synthèses et de comptes-rendus, ainsi que des traductions.
Usages internes
L’introduction de cet agent conversationnel va offrir de nombreuses possibilités d’usage interne au sein des collectivités territoriales :
- Aide à la rédaction : Les agents bénéficieront d’une assistance pour rédiger des documents administratifs, améliorant la qualité et la rapidité de production
- Synthèse de documents : L’IA pourra résumer des documents longs et complexes, facilitant la prise de décision et l’analyse d’informations
- Gestion administrative : L’automatisation de certaines tâches administratives permettra aux agents de se concentrer sur des activités à plus forte valeur ajoutée
Applications externes
Les collectivités territoriales peuvent utiliser l’IA pour améliorer leurs services aux administrés :
- Chatbots pour les administrés : Des agents conversationnels peuvent répondre aux questions fréquentes des citoyens, offrant un service continu
- Évaluation de l’efficacité des dispositifs : L’IA peut analyser les données pour mesurer l’impact des politiques publiques et adapter les services
- Solutions de « territoires intelligents et durables » : L’IA peut optimiser la gestion urbaine dans des domaines tels que la santé, la qualité de l’air, le logement et la gestion des déchets
Ces initiatives visent à compléter et non à remplacer le travail des agents publics. Le ministre a souligné l’objectif de proposer une version française et sécurisée de ces outils d’IA. Cela témoigne de la volonté de maintenir la souveraineté numérique tout en modernisant les services publics.
Défis « Convergence IA » : opportunités pour les collectivités
En complément de cette IA générative pour les services publics, ces défis offrent une occasion unique aux collectivités territoriales de s’impliquer dans le développement de l’IA au service de l’intérêt général.
Présentation des cinq thématiques clés
Les défis « Convergence IA » se concentrent sur cinq thématiques clés:
- IA au service de l’intérêt public
- L’avenir du travail
- Innovation et culture
- L’IA de confiance
- Gouvernance mondiale de l’IA
Focus sur « IA au service de l’intérêt public » et « L’IA de confiance »
La thématique « IA au service de l’intérêt public » est pertinente pour les collectivités. Elle vise à développer des solutions innovantes pour améliorer les services publics et la qualité de vie des citoyens. Les collectivités peuvent explorer des applications comme l’optimisation de la gestion énergétique des bâtiments publics ou l’amélioration de la mobilité urbaine.
L’axe « IA de confiance » est nécessaire pour l’adoption de l’IA dans le secteur public. Il aborde les questions d’éthique, de transparence et de sécurité des données, essentielles pour gagner la confiance des citoyens. Les collectivités doivent veiller à ce que leurs projets d’IA respectent ces principes pour assurer une acceptation sociale.
Comment les collectivités peuvent-elles participer et tirer parti de ces défis ?
Les collectivités territoriales peuvent participer aux défis « Convergence IA » de plusieurs manières – tout comme sur Numérique360 :
- Proposer des projets : Les collectivités peuvent soumettre des projets innovants en lien avec les thématiques prioritaires
- Collaborer avec des partenaires : Elles peuvent s’associer à des chercheurs, ingénieurs ou entreprises pour développer des solutions d’IA adaptées à leurs besoins spécifiques
- Partager leurs expériences : Les collectivités ayant déjà mis en place des initiatives d’IA peuvent échanger leurs retours d’expérience et bonnes pratiques
- Bénéficier de la visibilité : Les projets sélectionnés seront exposés lors du Sommet, mettant en avant les initiatives locales
- Accéder à l’expertise : Participer aux défis permet aux collectivités d’accéder à un réseau d’experts et de ressources pour surmonter les obstacles techniques et organisationnels
En s’engageant dans ces défis, les collectivités territoriales peuvent contribuer à l’innovation en IA et trouver des solutions pour améliorer leur efficacité opérationnelle et les services aux citoyens.
Financement et mise en œuvre de l’IA dans les collectivités
Le déploiement de l’intelligence artificielle (IA) dans les collectivités territoriales françaises s’inscrit dans une dynamique nationale ambitieuse, soutenue par des investissements conséquents et une stratégie globale.
Objectif de lever 2,5 milliards d’euros en cinq ans
Le gouvernement français a lancé une stratégie nationale pour l’intelligence artificielle (SNIA) en deux phases. La première phase (2018-2022) a été financée à hauteur de 1,85 milliard d’euros, tandis que la seconde phase (2021-2025) bénéficie d’un financement de 1,5 milliard d’euros dans le cadre de France 2030 comme le rappelait Guillaume Avrin, coordinateur national pour l’intelligence artificielle, lors d’un évènement de l’IMA fin janvier. Ces investissements visent à positionner la France comme un leader européen et mondial de l’IA.
Stratégie nationale et écosystème vertueux
La SNIA repose sur trois piliers stratégiques :
- Soutien à l’offre deep tech
- Formation et attraction des talents
- Rapprochement de l’offre et de la demande de solutions en IA
Cette approche vise à créer un écosystème favorable à l’innovation et l’adoption de l’IA dans tous les secteurs, y compris les collectivités territoriales. La stratégie met l’accent sur des domaines prioritaires tels que l’IA embarquée, l’IA de confiance, l’IA frugale et l’IA générative.
Recommandations pour intégrer l’IA dans les projets locaux
Pour les collectivités souhaitant intégrer l’IA dans leurs projets, voici quelques recommandations :
- Adopter une approche éthique : Veiller à ce que les projets d’IA respectent les principes d’éthique, de frugalité, de transparence et de protection des données des citoyens
- Former les agents : Investir dans la formation des agents publics pour assurer une utilisation efficace et responsable des outils d’IA
- Prioriser les projets environnementaux : La transition environnementale est un moteur essentiel de l’IA territoriale, avec de nombreux cas d’usage
- Identifier les financements disponibles : Utiliser notre page Financements pour trouver des subventions pour les projets d’IA
- Collaborer avec des partenaires : S’associer à des chercheurs, ingénieurs ou entreprises pour développer des solutions d’IA adaptées aux besoins spécifiques et utiliser les marchés d’innovation disponibles dans la commande publique
- Participer aux initiatives nationales : S’impliquer dans les défis « Convergence IA », Numérique360 et autres programmes nationaux pour bénéficier de ressources, d’expertise et de mise en visibilité des initiatives
- Mutualiser les ressources : Participer à des initiatives comme l’observatoire des impacts de l’IA pour échanger des expériences et des bonnes pratiques entre collectivités
En suivant ces recommandations et en s’appuyant sur les ressources nationales disponibles, les collectivités territoriales peuvent intégrer l’IA dans leurs projets, modernisant les services publics et améliorant la qualité de vie des citoyens.
Enjeux éthiques et de gouvernance pour les collectivités
L’intégration de l’intelligence artificielle (IA) dans les collectivités territoriales soulève des questions d’éthique et de gouvernance à traiter de manière proactive.
Importance d’une approche éthique et durable de l’IA
L’adoption de l’IA dans les collectivités nécessite un cadre éthique solide. Il est essentiel de concilier les gains de productivité avec des enjeux éthiques, sociaux et écologiques. Cette approche responsable doit s’intégrer dans un cadre de gouvernance tenant compte des valeurs de chaque exécutif et des attentes des habitants. Les élus locaux jugent « indispensable la définition d’un cadre éthique, juridique et démocratique, dans tous les domaines : économie, social, santé, éducation, sécurité… » Cette démarche vise à garantir que l’utilisation de l’IA reste alignée sur les valeurs de la collectivité et serve l’intérêt public.
Rôle des élus locaux dans la définition des usages de l’IA
Les élus locaux jouent un rôle central dans la définition et l’encadrement des usages de l’IA au sein de leurs collectivités. Ils appellent à une « grande concertation concernant les modalités d’utilisation de ces outils auprès des usagers et des agents territoriaux » et à « l’ouverture d’assises territoriales pour l’IA, au service des usagers et des agents du service public ». La mise en place de concertations territoriales de l’IA vise à définir, au plus près des usagers et des territoires, un cadre éthique, juridique et démocratique de ses usages. Ces initiatives rapprochent les citoyens, les collectifs et les associations de la politique et de ses institutions, assurant une gouvernance plus inclusive et représentative.
Protection des données des administrés et transparence
La protection des données personnelles des administrés est un enjeu majeur dans l’utilisation de l’IA par les collectivités. Les principes clés fixés par la loi doivent être respectés : finalité, pertinence, durée limitée de conservation, sécurité et droits des personnes. Les collectivités doivent assurer la transparence de leurs pratiques en matière d’IA. Les administrés doivent savoir quels traitements sont opérés sur leurs données personnelles. Cette transparence est essentielle pour maintenir la confiance des citoyens dans les services publics numériques.
L’intégration de l’IA dans les collectivités territoriales nécessite une approche équilibrée, éthique et transparente. Les territoires et les élus locaux seront, et sont déjà, confrontés à ces enjeux avec pour objectif de guider cette transformation en veillant à ce que l’IA serve l’intérêt public tout en protégeant les droits et la vie privée des citoyens.