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Démonstrateurs de la ville durable – L’innovation urbaine pour demain

Crédits photos : Urbanisme. Illustration de couverture : Vue aérienne DMC, Mulhouse, juin 2022. Photo : Tristan Vuano

Le programme Démonstrateurs de la ville durable (DVD), lancé en mai 2021 par l’État, est piloté par le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) et le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, et opéré par la Banque des Territoires ainsi que l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru). Mesure de la stratégie de France 2030, Solution pour la ville durable et les bâtiments innovants, il a pour objectif de participer à la relance économique du pays, tout en favorisant l’émergence de villes sobres, résilientes, inclusives et créatrices de valeurs, accélérant ainsi les nécessaires transitions écologiques.

Entre janvier et avril 2022, 39 démonstrateurs ont été désignés lauréats de l’appel à manifestation d’intérêt du programme, et cela, sur tous les types de territoires : métropoles, villes moyennes, périurbain, petites villes, territoires ruraux, outre-mer. Les thématiques explorées par les collectivités et leurs aménageurs sont la construction durable, les habitats et aménagements innovants, la résilience et la renaturation, les énergies renouvelables, la participation citoyenne, les espaces publics, les activités productives et la gestion des services urbains.

Ce supplément à la revue Urbanisme se veut un panorama, non exhaustif, des innovations engagées au sein du programme DVD. Il met en lumière six grandes thématiques avec, pour chacune, plusieurs démonstrateurs, qu’ils soient au stade de l’incubation ou au démarrage de leur phase opérationnelle, venant illustrer les innovations et leur potentiel de réplicabilité.

Extrait.

UNE GOUVERNANCE INTELLIGENTE DE L’ÉNERGIE

Face à une nécessaire économie de l’énergie, les aménageurs s’appuient sur l’innovation technologique pour déployer de nouvelles méthodes de gestion et de contrôle de la ressource. Portés par des collectivités et leurs aménageurs en lien avec des pôles universitaires à la pointe, ces prototypes révolutionnent notre consommation en récupérant, stockant et mutualisant l’énergie, en impliquant une gouvernance multi-acteurs.

Plusieurs démonstrateurs font une priorité de la baisse des consommations énergétique du bâti existant, que ce soit dans le logement, le tertiaire, ou les bâtiments publics. En complément des travaux de rénovation énergétique, plusieurs démonstrateurs réfléchissent au déploiement de solutions de pilotage pour optimiser les consommations.

À Mulhouse, la Ville valorise son patrimoine industriel emblématique, et transforme un vaste site hérité de l’industrie textile en quartier de ville mixte et vert faisant la part belle à l’économie créative. Le démonstrateur Quartier DMC, en phase d’incubation, met à l’honneur les quatre défis de la ville durable en s’appuyant sur un jumeau numérique de quartier innovant. « Cet outil inédit dans sa mise en oeuvre à l’échelle d’un territoire complet est hérité de l’industrie ; il a pour objectif d’optimiser l’utilisation de diverses ressources comme l’énergie, l’eau, les espaces utiles ou les équipements, détaille Adèle Wickersheim, directrice du projet urbain Quartier DMC pour la Ville de Mulhouse. Il est pensé comme un facilitateur, et permet de suivre et de coordonner en temps réel les intrants et les flux en impliquant les différentes parties prenantes. » Si la démarche est d’abord testée dans le domaine énergétique, l’ambition est de l’appliquer à d’autres champs, comme le cycle de l’eau au service de l’îlot de fraîcheur ou la mutualisation des espaces dans les territoires en tension. La Ville, qui lie innovation technique et participation, développe d’ailleurs un « jumeau numérique citoyen » avec des associations locales pour favoriser le partage de matériels, de savoirs et de compétences. Cette logistique d’optimisation sera d’abord expérimentée sur le quartier DMC élargi, avant d’être répliquée sur l’ensemble du territoire mulhousien.

Le jumeau numérique est un vrai atout pour parvenir au « zéro carbone énergie » sur ce site de 13 hectares. Une tâche ardue, précise la directrice du projet, « car il y a 110 000 m2 de bâtiments industriels patrimoniaux à transformer de manière vertueuse et peu de constructions neuves prévues. Il faut donc travailler sur l’existant ». Le quartier doit être raccordé au réseau de chaleur alimenté par de l’énergie de récupération verte à l’horizon 2030. Avant cela, la Ville souhaite optimiser le mix énergétique et équiper les grandes surfaces de toitures, caractéristiques des bâtiments industriels, en panneaux photovoltaïques pour assurer l’autoconsommation du quartier.

Le jumeau numérique joue ainsi un rôle majeur de gestion et de liaison entre une pluralité d’acteurs : industriels, économiques, habitants et usagers, dans le but d’optimiser le fonctionnement de ce mix énergétique. « En intégrant un outil comme celui-ci, on ouvre le travail sur le partage des ressources et on encourage de nouvelles solidarités entre les acteurs », conclut Adèle Wickersheim.

Belfort e-Start : la première communauté d’énergie renouvelable du secteur tertiaire

Au cœur du parc d’activités du Techn’hom, l’opération d’aménagement Belfort e-Start s’étend sur 35 hectares. En cours d’incubation, le projet vise le développement d’un quartier sobre et autonome en énergie renouvelable. Pour atteindre la neutralité carbone en 2050 sur ce secteur qui compte une centaine d’entreprises, il prévoit de fédérer les acteurs autour d’un écosystème en créant la première communauté d’énergie renouvelable (CER) pour le secteur tertiaire en France. Popularisée en Europe, mais peu développée dans l’Hexagone, son édification se confronte aux limites d’une réglementation prudente. L’idée a émergé à la suite du décret tertiaire paru dans la loi ELAN qui énonce des objectifs de réduction des émissions à horizon 2030, 2040 et 2050. « Dans des bâtiments anciens comme ceux présents sur la ZAC [zone d’aménagement concerté, ndlr], il n’est pas possible d’obtenir de tels ratios avec de simples rénovations, explique Nicolas Gaud, directeur du pôle Énergie et informatique de l’UTBM. Nous avons donc décidé de produire de l’énergie verte, qui sera déduite des volumes de consommation énergétique des bâtiments. »

Le projet est porté par un consortium à la pointe de l’innovation avec le Grand Belfort, l’UTBM, la SEM (société d’économie mixte) Tandem, gestionnaire du patrimoine immobilier, et Enedis, gestionnaire du réseau public d’électricité. La présence de ce dernier est cruciale. En effet, l’électricité produite sortira du réseau classique géré par un maillage national, dans des quantités d’énergie importantes et sur un périmètre restreint. « Si on ne le fait pas de manière intelligente, cela pourrait poser des problèmes et déstabiliser la grille électrique », souligne Nicolas Gaud. Des outils d’équilibre et d’intermittence seront testés en fonction de l’heure et de la période de l’année afin de conserver cette énergie. « Le projet revêt une innovation supplémentaire, poursuit John Vinolas, directeur du développement économique du Grand Belfort, avec une IA qui pourra prédire le comportement de ces installations. C’est une brique technologique essentielle portée par l’UTBM. »

Pourvoyeur d’une innovation nationale, le Grand Belfort est conscient de l’importance de partager la connaissance et de communiquer auprès des habitants, reconnaît John Vinolas. « Nous avons créé des supports de formation avec l’UTBM pour acculturer d’autres territoires qui n’auraient pas la maîtrise d’une CER et nous attachons aussi une importance à la diffusion auprès du grand public qui démontre les apports du projet. » Avant de démarrer la phase de réalisation, le consortium travaille aux côtés de France Expérimentation afin de faire évoluer les réglementations, et ainsi faciliter le déploiement de futurs projets.

Badevel, un village ultraconnecté au service de la sobriété

Avec une population de moins de 1 000 habitants, Badevel fait figure de Petit Poucet dans le programme Démonstrateurs de la ville durable (DVD), ce qui n’a en rien impressionné le professeur à l’université technologique de Belfort-Montbéliard (UTBM) et maire de la commune, Samuel Gomes.

Le projet, dont la phase de réalisation a débuté en avril 2024, a l’ambition de revitaliser le village en intervenant sur l’activité économique, le maintien et la restructuration d’équipements publics, l’habitat et l’autonomie en énergie. Il répond également à un besoin de résilience de la commune face aux fluctuations des prix de l’énergie et au défi de gestion d‘équipements et services municipaux avec un personnel réduit, des défis majeurs rencontrés par les collectivités de taille similaire.

L’initiative repose d’abord sur la rénovation énergétique des bâtiments publics de la commune. Le Living Lab, un tiers-lieu laboratoire, centralisera les innovations, dont la production et le stockage d’électricité ou la chaufferie à plaquettes forestières.

Ces innovations technologiques seront couplées à un volet d’inclusion sociale, en associant les habitants à la constitution d’une future communauté d’énergie et à des démarches d’acculturation. Un projet aux caractéristiques uniques, révèle Samuel Gomes. « Nous développons un prototype à l’échelle d’une petite commune tout en hybridant plusieurs transitions : alimentaire, énergétique, écologique et démographique, ce qui en fait un projet particulièrement innovant. »

Pour gérer l’ensemble de ces transitions, Badevel a mis en place un système de connectivité global. Les systèmes connectés de la commune sont ainsi visibles sur un même tableau de bord, accessibles aux services municipaux et aux élus. « Il s’agit de démontrer qu’il est plus intéressant d’intégrer tous ces outils dans la même plateforme pour créer de l’intelligence artificielle et de l’interopérabilité des données. » Afin de faciliter ce pilotage complexe, la commune s’est dotée d’un jumeau numérique, soit une modélisation en trois dimensions du village qui « permet de visualiser les données de manière plus parlante et ludique ».

Dans le cadre du projet, une start-up, Badevel i55, a été créée pour accompagner sa réplication auprès des territoires ruraux intéressés, en s’appuyant sur les outils de simulation prédictifs développés par Badevel et ses partenaires.

 

Cet article vous est proposé par Revue Urbanisme

Depuis 1932, Urbanisme est le creuset d’une réflexion permanente et de discussions fécondes sur les enjeux sociaux, culturels, territoriaux de la production urbaine. La revue a traversé les époques en réaffirmant constamment l’originalité de sa ligne éditoriale et la qualité de ses contenus, par le dialogue entre chercheurs, opérateurs et décideurs, avec des regards pluriels.

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