Une gestion durable de l’eau grâce au capteurs et réseau IoT à Lambersart (59)
La ville de Lambersart a lancé un projet d’optimisation de la gestion de l’eau basé sur l’installation de capteurs sur des cuves de récupération d’eau de pluie. Cette démarche vise à surveiller et à optimiser l’utilisation de l’eau pour l’arrosage urbain et les serres municipales. En mesurant les niveaux d’eau et en utilisant des données météorologiques locales, la ville cherche ainsi à réduire le gaspillage et à s’adapter aux défis climatiques. Les capteurs permettent de vérifier l’utilisation effective des cuves et d’ajuster l’arrosage en fonction des précipitations, contribuant ainsi à une gestion durable des ressources en eau.







Entretien avec Pierre Ciemniejewski

Ce projet est présenté par :
Pierre Ciemniejewski est Chef de Projet IoT, Innovation, Transformation Digitale et OpenData à Lambersart
Parole de collectivité
Afin de vous permettre de mieux appréhender la mise en place des projets numériques, data et IA sur votre territoire, Numérique360 part à la rencontre d’élus et de porteurs de projets qui sont passés à l’action
En quoi consiste concrètement ce projet de cuves connectées et quels en sont les principaux objectifs ?
Le projet consiste à équiper des cuves de récupération d’eau de pluie de capteurs pour mesurer leur niveau et leur utilisation. Les principaux objectifs sont de vérifier l’utilisation effective des cuves, d’optimiser l’arrosage urbain en fonction des données météorologiques, et donc in fine de réduire la consommation d’eau potable. Le projet bénéficie également des données transmises par une station météo locale déjà en fonctionnement pour une gestion plus précise des ressources en eau. En surveillant les niveaux d’eau et les précipitations passées et à venir, la ville peut mieux planifier l’arrosage et éviter le gaspillage.
Comment le sujet de l’installation de capteurs s’est-il imposé à l’agenda de votre collectivité ?
La question de la gestion de l’eau est un sujet déjà ancien à Lambersart. Il s’est imposé en raison des défis climatiques et des pénuries d’eau que nous avons rencontrés. Ces dix dernières années, la collectivité s’est progressivement équipée de diverses cuves de récupération de l’eau, installées sur cinq sites stratégiques.
L’eau de pluie ainsi récoltée est utilisée pour l’arrosage urbain, l’entretien des parterres arborés, l’irrigation des serres municipales, et même pour le remplissage des réservoirs des balayeuses. Toutefois, il était difficile de déterminer si ces cuves étaient exploitées de manière optimale. En effet, malgré une capacité maximale théorique de 120 mètres cubes, nous continuons d’observer, en été, une consommation excessive d’eau potable. Ce constat a suscité des préoccupations internes quant à la durabilité de nos ressources en eau : soit les capacités de stockage ou les précipitations étaient insuffisantes, soit notre gestion de l’eau stockée pouvait être améliorée.
Nous avons donc lancé ce projet d’installation de capteurs afin d’optimiser l’utilisation de nos cuves. Une première expérimentation a été initiée pour mesurer le niveau de récupération de l’eau de pluie.
Parallèlement, un projet concernant les îlots de fraîcheur urbains et l’acquisition de notre propre station météorologique nous a permis de recueillir des données complémentaires utiles pour la gestion de l’arrosage.
Quelles sont les sources d’inspiration que vous avez suivies pour vous faire une idée de ce projet ?
Notre collectivité a puisé essentiellement son inspiration dans l’expérience acquise ces dernières années en matière d’IoT et dans divers projets. Parallèlement, nous nous tenons à une veille et à un sourcing réguliers. Nous consultons en effet régulièrement nos partenaires techniques ainsi que des fabricants de capteurs pour identifier les nouvelles solutions disponibles.
Y a-t-il des compétences ou sujets spécifiques à maîtriser avant de se lancer dans un projet IoT?
Pour se lancer dans ce projet, l’autonomie est essentielle. Une solide compréhension des systèmes de télécommunication et d’électronique, ainsi que des réseaux IoT comme LoRa, est indispensable pour tester et administrer les capteurs.
La maîtrise des outils d’analyse et de visualisation de données est également cruciale pour exploiter les informations collectées. Des compétences en gestion de projet sont par ailleurs nécessaires pour collaborer avec les différents services municipaux. Une approche itérative et flexible est vitale pour s’adapter aux différentes contraintes rencontrées.
Enfin, l’auto-formation continue et la connaissance des dernières technologies sont essentielles. Comprendre les données météorologiques et hydrologiques est aussi un sérieux atout, car ces compétences aident à optimiser l’arrosage et la gestion de l’eau de pluie.
Quelles furent les phases préparatoires de ce projet ? Avez-vous mené une étude en amont du projet pour définir sa faisabilité et/ou son impact ?
Tout d’abord, nous avons identifié les cuves stratégiques et les cuves secondaires. Si chacune d’entre elles a une capacité de 10 mètres cubes, leurs emplacements, plus ou moins loin de certains usages, devaient être pris en compte.
Des tests pilotes ont été réalisés pour évaluer la performance des capteurs et des systèmes de communication, en ajustant les paramètres pour assurer la viabilité à long terme du projet.
La collaboration en amont avec les différents services municipaux a aussi été essentielle pour définir les besoins et les attentes. Une réflexion a été menée pour créer une interface de visualisation simple d’utilisation.
Un autre enjeu des phases préparatoires était pour nous d’obtenir des jeux de données complémentaires. La ville mobilise par exemple les données d’un autre projet mis en place plus tôt et consacré aux îlots de fraîcheur urbains. Nos grandes zones arborées sont concrètement équipées, par exemple, de capteurs de température.
Nous avons pensé également qu’il serait intéressant d’avoir des données météorologiques globales pour le territoire afin de pouvoir mesurer les taux d’humidité et la pluviométrie. La collectivité a donc fait l’acquisition d’une station météorologique.
Grâce à cela, nous connaissons précisément les variations de la quantité d’eau tombée sur les différentes parties de la ville et nous pouvons ajuster la nécessité d’un arrosage ainsi que sa durée.
Enfin, nos cuves de récupération d’eau de pluie sont installées au pied de bâtiments. Connaissant la surface des toitures, nous pouvons estimer la quantité d’eau récupérable. Globalement, le calcul consiste à multiplier la surface en mètres carrés de la toiture par un coefficient qui ajuste la récupération d’eau en fonction du matériau de la toiture.
Ces différentes données nous fournissent des indicateurs complémentaires très utiles pour optimiser l’eau de nos cuves. Les croiser nous offre des marges de progression dans les prochains mois pour réguler et gérer de façon encore plus optimale l’arrosage urbain.
Comment avez-vous assuré le bon dimensionnement du projet ?
Concernant les tests des capteurs, nous avons travaillé en mode POC (Proof of Concept). Cela signifie qu’avant de déployer une technologie à un ensemble plus large, nous essayons de démontrer sa pertinence.
Dans le cas de l’optimisation de l’impact de nos cuves, nous avons ainsi lancé une première expérimentation après un repérage minutieux des différents modèles de compteurs existants pour mesurer le niveau de récupération de pluie. L’enjeu était de faire face aux défis posés par la nature même des cuves, en béton armé, et sécurisées par des plaques en fonte. C’est une contrainte majeure pour l’usage de LoRaWAN, car le réseau passe très mal à travers le métal.
Pour contrer cette problématique, nous avons pris le parti d’installer des capteurs Cyble Sensor 42K, non pas à l’intérieur des cuves, mais sur les compteurs d’eau Itron déjà installés et qui mesurent la consommation effective. Ce type de capteur permet de récupérer les impulsions des compteurs et d’envoyer les données via le réseau LoRaWAN.
Concernant la visualisation des données collectées : afin d’assurer le bon dimensionnement de ce projet, nous avons développé un outil de visualisation des données, simple d’utilisation et extrêmement flexible. Il permet d’offrir soit une vue d’ensemble, soit des détails spécifiques, selon les besoins. Les capteurs sont représentés virtuellement avec des chiffres mis à jour en temps réel, ce qui simplifie grandement la compréhension et l’analyse des données.
En pratique, seuls les directeurs de service ont accès à ces informations. Les agents sur le terrain, quant à eux, n’y ont pas accès directement, car cela nécessiterait des compétences et des outils spécifiques.
Comment la collectivité a-t-elle financé ce projet et quelles ont été les aides sollicitées/obtenues ?
Le projet a été financé par le service informatique de la ville. Nous disposons d’un budget annuel d’environ 20 000 euros pour le projet LoRa dans sa globalité. Aucune aide extérieure n’a été sollicitée, car la ville était déjà en avance sur les expérimentations finançables.
Les coûts ont été optimisés en utilisant des solutions internes et en évitant les dépenses inutiles. La ville a également bénéficié de l’expertise et des ressources disponibles en interne pour mener à bien le projet.
De plus, des partenariats avec des fabricants de capteurs et des prestataires de services ont permis de réduire les coûts et d’assurer la réussite du projet. Enfin, la ville disposait déjà de son propre réseau LoRa.
Quels sont les autres acteurs qui vous ont accompagnés dans la préparation et la réalisation de ce projet ?
Aucun autre acteur n’a accompagné la collectivité dans la préparation et la réalisation de ce projet.
Quels conseils donneriez-vous à un élu qui souhaiterait se lancer dans un projet similaire ?
Les conseils ne seront pas les mêmes selon la situation de la municipalité. Si celle-ci ne dispose d’aucun réseau LoRa, IoT, ou de projet de ce type, il existe deux solutions. Soit la municipalité possède des compétences en interne et un budget limité, et dans ce cas, elle peut, comme nous, installer son propre réseau LoRa. Cela facilite l’expérimentation à moindre coût, car le principal investissement concerne les capteurs. Soit elle utilise des opérateurs externes, bien que cela puisse sembler moins idéal. Ce choix doit être principalement motivé par les compétences disponibles en interne.
Personnellement, je trouve intéressante l’approche des réseaux mixtes. Cela signifie qu’une municipalité peut commencer par acheter deux ou trois antennes pour couvrir son territoire et combler les lacunes de couverture en utilisant une plateforme capable de gérer à la fois des réseaux privés et publics. Cela permet de combler les trous de réseau qui peuvent exister sur un territoire.
Une fois le réseau en place, l’accent peut alors être mis sur la rationalisation des fluides et la surveillance de la consommation des bâtiments. Pour cela, la municipalité peut soit utiliser ses compétences internes soit faire appel à des AMO (Assistance à Maîtrise d’Ouvrage) externes. Ces derniers peuvent réaliser des études et recommander divers équipements et installations sur le territoire.
Un autre aspect important est de se concentrer sur la visualisation des données pour une gestion efficace. Cela permet de mieux comprendre les besoins et les attentes du projet. De plus, il est crucial de collaborer avec les différents services municipaux pour définir les besoins et les attentes parfois complémentaires, assurant ainsi une approche cohérente et bien coordonnée.
Adopter une approche itérative et flexible est également recommandé pour s’adapter aux obstacles et défis techniques rencontrés. Cela permet de s’adapter rapidement aux changements et aux nouvelles informations.
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Le projet en détails
Dates clés
Septembre 2023
Mars 2024
Eté 2024
Chiffres clés
120
5
20 000
À retenir
Le projet favorise une utilisation durable et responsable des ressources hydriques, réduisant ainsi le gaspillage
Avec un coût relativement bas, ce projet est accessible à diverses villes, y compris celles avec des budgets limités.
L'adoption de nouvelles technologies et méthodes de gestion nécessite un temps d'adaptation pour les différents services municipaux
Ressources
Ville de Lambersart
Habitants
Données de contact
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