Grâce à l’IA, le Sicoval (31) détecte les fuites d’eau

En quoi consiste concrètement votre projet et quels en sont les principaux objectifs ?

Le Sicoval est une communauté d’agglomération péri-urbaine regroupant 36 communes, situées dans le sud-est de Toulouse. Nous gérons 1000 Km de réseau d’eau potable avec un rendement global de 78 % (ce qui signifie que 22 % de l’eau du réseau retourne dans le milieu naturel à cause de fuites, NDLR). C’est un rendement correct, mais nous estimons que dans le contexte actuel de tension sur la ressource en eau, il faut faire mieux. En effet, nous ne pouvons pas accepter de perdre environ 1 million de m3 chaque année. C’est pourquoi, nous avons décidé d’améliorer ce rendement. Dans ce contexte de recherche de fuites, nous avons testé un outil utilisant de l’IA. La société Leakmited a développé un algorithme exploitant une base de données, comprenant notamment plus d’un million de fuites, le contexte géologique, la météo, la topographie, … . L’IA a permis d’optimiser l’efficacité de la recherche de fuites en déterminant les portions du réseau où il y avait le plus de potentiel de fuites, en seulement deux semaines 12 fuites ont été trouvées. Nous les avons immédiatement réparées, ce qui a permis d’éviter 113 000 m³ de pertes d’eau sur le réseau (soit la consommation annuelle de 950 foyers) et de réaliser une économie financière d’environ 93 000 euros.

Comment le sujet s’est imposé à l’agenda de votre collectivité ?

Depuis 2005 nous avons commencé à installer des débitmètres de sectorisation sur notre réseau d’eau. Une opération complétée en 2010 par un second déploiement. Nous disposons désormais d’une cinquantaine de débitmètres connectés qui donnent des informations sur le volume d’eau circulant dans les canalisations. Nous avons accès à ces données de télégestion via notre exploitant : Réseau 31. Ces données nous permettent déjà d’identifier des fuites, grâce à des débits suspects la nuit. Mais la zone de recherche reste large, car chaque débitmètre couvre plusieurs kilomètres de réseau et plusieurs centaines d’abonnés. En 2023, nous avons rencontré la société Leakmited lors d’un salon de l’eau et ils nous ont présenté leur solution, dont l’engagement est d’identifier les 20 à 30 % du réseau qui concentrent 80 % du potentiel de fuites, grâce à une analyse par IA. Nous avons été intéressés, et nous avons décidé d’exploiter la solution en 2024. Il y a eu deux semaines d’analyse de données et deux semaines de recherches de fuites sur le terrain réalisées par un de leurs techniciens.

Par la suite, nous envisageons d’exploiter un autre module de leur offre, permettant de faire du prédictif. Plus précisément, l’IA va identifier les portions de réseau où les canalisations sont vétustes afin de prioriser les travaux de renouvellement. Nous agirons ainsi avant que les fuites ne se produisent, avec une approche de maintenance prédictive.

Quelles sont les sources d’inspiration du projet ?

Nous avons été inspirés par les retours d’expérience évoqués par Leakmited.

Quelles furent les phases préparatoires du projet ?

Nous ne sommes pas passés par une phase de test. La solution a directement été mise en exploitation de manière opérationnelle (et commerciale). Nous avions identifié deux secteurs pour exploiter la solution : un rural à Baziège, où un nouveau réservoir augmentait la pression sur les réseaux, et un en zone urbaine à Castanet-Tolosan, où il y avait des débits suspects la nuit. Cela nous faisant 100 Km de réseau, qui est le minimum requis par Leakmited pour que la solution puisse être utilisée.

Quelles sont les données mobilisées pour le projet ? (données internes, open data, données de prestataires externes, données de prestataires IA …)

Leakmited exploite en grande partie ses propres données sur les fuites déjà analysées. Mais l’IA a également besoin de data locales. Nous avons donc fourni un historique des fuites sur 5 ans de notre réseau. Nous avons également fourni un plan du réseau via notre SIG (système d’information géographique).

Concernant les compétences, quels sont les principaux sujets à maîtriser avant de se lancer dans ce projet ? Y a-t-il des compétences spécifiques à avoir en interne et/ou en externe ?

Il faut des compétences dans la gestion de l’eau, bien entendu, mais également dans l’interprétation et l’analyse des données des débitmètres. Une bonne connaissance du fonctionnement du réseau et du territoire est également requise. Tout le travail avec l’algorithme a été réalisé par notre prestataire. En externe, notre exploitant Réseau 31 a collaboré à l’opération pour les réparations des fuites. Il avait été prévu au préalable que les fuites soient réparées au fur et à mesure. Cela a permis d’avoir des résultats probants en seulement 15 jours.

Lors de la phase de diagnostic et de planification, comment avez-vous assuré le bon dimensionnement du projet ?

Comme évoqué plus haut, nous avons sélectionné deux sites où nous savions qu’il y avait des risques potentiels de fuites.

Avez-vous mis en place une démarche éthique et IA ? (label)

Le Sicoval est engagé dans une démarche de numérique responsable. Mais sans lien direct avec ce projet.

Comment avez vous traité les enjeux environnementaux liés à l’IA ainsi que celui de l’adhésion des citoyens ?

Nous avons pris en compte dans ce projet les enjeux environnementaux liés à la production et à la distribution de l’eau potable, pas directement les impacts environnementaux de la solution d’IA.  Les citoyens n’ont pas été impliqués dans le projet.

Comment la collectivité a-t-elle financé ce projet et quelles sont les aides sollicitées/obtenues ?

Leakmited facture sa prestation au résultat, c’est-à-dire au volume d’eau économisé. Dans notre cas : le coût de la prestation était de 20 000 euros, financé par le Sicoval. Mais cela a été vite rentabilisé, puisque la réparation des 12 fuites nous a fait économiser près de 93 000 euros.

Quels sont les autres acteurs qui ont accompagné ou co-construit ce projet ? Les citoyens ont-ils participé au projet ?

Ce projet a été porté par le Sicoval, en partenariat avec notre exploitant Réseau 31.