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Quels sont les enjeux du numérique responsable, au cœur de la loi REEN ?

Cet article a été rédigé par Charlotte Hygounenc

Crédits photos : Vincent Courboulay Crédits photo : La Rochelle Université - Mélanie Chaigneau

Entretien avec Vincent Courboulay, maître de conférences à l’Université de La Rochelle et cofondateur de l’Institut du Numérique Responsable (INR)

Vincent Courboulay, maître de conférences à l’Université de La Rochelle et cofondateur de l’Institut du Numérique Responsable (INR), décrypte une notion qu’il explore depuis des années : le numérique responsable. Passée du domaine de la recherche au concret des politiques publiques, cette approche vise à réduire l’empreinte environnementale des technologies. Depuis son inscription dans la loi REEN, le numérique responsable est devenu un objectif pour les collectivités, chargées de déployer des stratégies concrètes.

Pourquoi associer les termes « numérique » et « responsable » ?

Relier le numérique à la notion de responsabilité, c’est sortir d’une approche purement technophile pour reconnaître les impacts de nos usages technologiques sur les plans environnementaux et sociaux. Si le numérique est la solution pour répondre à un bon nombre de défis actuels en matière de gestion des territoires, son développement exponentiel a un coût écologique élevé : consommation énergétique, captation de ressources rares, production de déchets électroniques. Adopter une stratégie « responsable » implique donc de repenser nos pratiques pour limiter ces effets négatifs, en visant une utilisation plus durable, équitable et transparente des technologies. Le numérique doit servir les collectivités, sans aggraver leur dette environnementale, renforcer les inégalités sociales ou altérer leur fonctionnement économique. 

La définition la plus commune de « numérique responsable » repose sur une vision élargie qui englobe les trois piliers du développement durable : l’économie, le social et l’environnement. Il s’agit, en somme, d’appliquer au numérique les Objectifs du Développement Durable (ODD) posés par l’ONU comme des indicateurs pour mettre en place une stratégie responsable. Les territoires, en pleine transition numérique, font partie du triptyque de la solution (citoyens – entreprises privées – collectivités) et constituent ainsi un levier important d’action face aux urgences climatiques et sociales.

Les impacts du numérique ne sont donc pas si « déconnectés » des territoires ?

Les impacts du numérique sont souvent perçus comme éloignés des territoires. Même à l’échelle globale, les effets environnementaux demeurent largement invisibles… mais sont pourtant bien réels : le numérique représente 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, un chiffre qui pourrait atteindre 6 % dans les années à venir. Sur le plan local, ces conséquences se manifestent très concrètement avec la multiplication de datacenters (ou centre de données), l’occupation des terres agricoles pour le stockage de données, l’augmentation de la consommation énergétique, ou encore l’obsolescence des équipements informatiques… S’ajoutent à ces enjeux des répercussions sociales, caractérisées par le phénomène de « fracture numérique », les problèmes d’accessibilité, et l’illectronisme (c’est-à-dire l’incapacité à utiliser les outils numériques) qui concernerait 20 % de la population française. Il faut voir le numérique comme part du problème… et de la solution. 

On peut également voir le numérique responsable comme l’addition du green IT et du IT for green. Le green IT correspond à la « technologie verte » et désigne les pratiques visant à améliorer l’empreinte du numérique, par exemple via l’optimisation énergétique des serveurs, ou par la prolongation de la durée de vie des équipements. En combinant l’expression dans l’autre sens, on obtient le IT for green, c’est-à-dire « la technologie pour le vert », qui vise à utiliser le numérique comme outil pour réduire l’impact écologique des autres secteurs, comme l’amélioration des transports grâce aux applications de mobilité. Cette approche intégrée permet de considérer le numérique à la fois comme un problème et comme une solution.

Devons-nous comprendre la loi REEN comme un moyen d’arriver à un numérique plus vert, et plus rentable ?

L’intégration d’une stratégie de « numérique responsable » est désormais une obligation légale pour la plupart des collectivités. L’article 35 de la loi REEN (Réduction de l’Empreinte Environnementale du Numérique) impose aux communes de plus de 50 000 habitants de définir une stratégie de numérique responsable d’ici au 1er janvier 2025. Cette législation ne doit pas être vécue comme une contrainte, mais plutôt comme une opportunité pour se former aux nouveaux outils numériques. C’est une chance pour réinventer les pratiques et placer les territoires à l’avant-garde du numérique durable. Une réévaluation « responsable » de l’usage du numérique au sein d’une collectivité devrait aussi conduire à des économies substantielles, en ajustant la consommation énergétique et en se libérant des abonnements coûteux, souvent désuets, pour embrasser des solutions plus adaptées.

Est-il nécessaire d’obtenir le Label Numérique Responsable ?

Pour accompagner cette transition, l’INR a créé le Label NR (Numérique Responsable). Il permet aux collectivités de suivre un référentiel précis, d’auditer leurs pratiques et de mettre en place des plans d’action. Son ambition est de guider les territoires dans l’adoption d’une stratégie cohérente et mesurable. Avec une communication adéquate, le label représente un gage de confiance pour les citoyens et les partenaires économiques, attestant de l’engagement de la collectivité. Comme l’obtention du label peut s’avérer coûteuse pour certaines collectivités, le référentiel est désormais accessible à tous. Il peut être utilisé comme une checklist pour amorcer des actions, même sans certification !

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